L'électricien a publié sa contribution au débat public sur la Programmation pluriannuelle de l'énergie. A contrario de RTE, il mise sur une évolution de la consommation légèrement positive et confirme ne vouloir fermer aucun autre réacteur que Fessenheim avant 2029.
EDF confirme vouloir faire fonctionner ses réacteurs jusqu'à, au moins, leur cinquantième anniversaire – soit 2029 pour les réacteurs les plus anciens, comme Tricastin
Pas de graphe, très peu de chiffres : EDF, qui produit plus de 80 % de l'électricité en France, livre une version littéraire de sa vision du mix énergétique à l'horizon de dix ans. Dans le cadre du débat public organisé pour la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) qui fixera la feuille de route du gouvernement pour la période 2019-2023 puis 2024-2028, EDF vient de transmettre son « cahier d'acteurs ».
Sur la forme, l'exercice est succinct – une note de quatre pages, selon les normes édictées par la Commission particulière du débat public. Et sur le fond, EDF ne voit guère ses grands équilibres changer ces dix prochaines années.
Transferts d'usage
La seule donnée sur laquelle EDF se prononce précisément est sa perspective d'évolution de la consommation d'électricité. Tandis que les scénarios de RTE (le gestionnaire du réseau haute tension) parient au mieux sur une stabilisation de la demande à l'horizon 2035 et plus probablement sur une nette baisse, EDF table sur une croissance de 0 à 0,5 % par an ces vingt prochaines années. Une hausse annuelle modeste, mais qui pourrait au final se traduire à l'horizon 2035 par une consommation supplémentaire de 40 à 50 térawattheures (contre 482 TWh en France l'an dernier).
Selon EDF, l'efficacité énergétique serait en effet plus que compensée par les transferts d'usages : la mobilité électrique mais aussi un changement, que l'entreprise appelle de ses voeux, de la réglementation thermique dans les logements neufs, aujourd'hui favorable au gaz. EDF a toutefois infléchi sa position par rapport à 2015. Il tablait alors, à l'horizon 2030, sur une croissance de la demande en électricité entre 0,5 et 1 % par an.
Cinquantième anniversaire
Côté production, EDF n'entend pas céder de terrain d'ici 2028, l'horizon de la PPE. Alors que le gouvernement a repoussé au-delà de 2025 l'objectif de réduction de 75 % à 50 % de la part du nucléaire dans la production d'électricité, EDF confirme vouloir faire fonctionner ses réacteurs jusqu'à, au moins, leur cinquantième anniversaire – soit 2029 pour les réacteurs les plus anciens, comme Tricastin (Drôme). « Nous envisageons certains des arrêts dès le début des échéances des cinquièmes visites décennales, à partir de 2029 », indique EDF dans sa note, sans cadencer ni proposer de rythme de fermeture ultérieure.
« Il s'agit là de la vision industrielle et économique d'EDF », précise tout de même l'électricien, rappelant que « les décisions d'évolution du mix de production relèvent évidemment de la puissance publique ». Ce qui signifie, en creux, que si le gouvernement veut fermer des réacteurs avant 2029, il faudra indemniser EDF – comme l'Etat s'apprête à le faire à Fessenheim. En parallèle, EDF produira plus d'énergie solaire : son plan présenté en décembre pourrait, s'il se concrétise dans les délais, mettre sur le marché une quinzaine de térawattheures de production annuelle supplémentaire dans une dizaine d'années.
Nouveau nucléaire
Alors que l'émergence des batteries, la meilleure isolation des logements ou le compteur Linky devraient à moyen terme limiter les pics de consommation, EDF ne livre pas de vision sur la gestion des surcapacités, ni même sur ses exportations à dix ans.
En revanche, EDF estime déjà « nécessaire » de soulever la question de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires en France. « Un engagement rapide conduit à une première mise en service d'une nouvelle centrale en 2030 ou peu après », indique le groupe dans sa note. En faisant poindre, à défaut, le risque de la perte d'attractivité du secteur. A la demande du gouvernement, le conseiller du PDG d'EDF Yannick d'Escatha et l'ancien directeur général de l'armement Laurent Collet-Billon plancheraient sur le sujet.
Véronique Le Billon - LES ECHOS 23/05/2018
- Connectez-vous ou inscrivez-vous pour publier un commentaire